Mon très cher ami,
Ta lettre m'a enfin tirée de mon inquiétude. Sans nouvelles de toi depuis des semaines, je
plongeais dans le désespoir. Aujourd'hui, le soleil est revenu dans mon
cœur.
Ton départ pour ce pays lointain m'a laissée meurtrie,
pantelante, vide de tout sentiment.
Les seules pensées qui m'habitaient encore t'accompagnaient tout au long de ce voyage
forcé, t'imaginaient sur ce bateau que tu ne voulais pas prendre.
Tu me donnes peu de détails, mais suffisamment pour que je comprenne que la vie à bord
doit être difficile pour toi, humble médecin devenu marin contre son gré.
Mon ami très cher, combien de temps encore serons-nous séparés?
Je sais qu'il est impossible de répondre à cette question et que je ne dois pas me bercer de faux
espoirs. Mais sache que je t'attendrai tout au long des jours que je vivrai sans toi.
Les hortensias que tu as plantés sous la fenêtre de notre chambre sont
magnifiques. J'en ai fait un bouquet que j'ai porté hier à notre recteur pour qu'il fleurisse l'autel. J'ai allumé
un cierge pour toi.
J'ai détaché le timbre de ta lettre, et je l'ai mis dans le petit coffret orné de coquillages que tu m'avais offert pour mon
anniversaire. Il me semble qu'il y a si longtemps déjà.
Je l'ai embrasse, ce timbre que ta main a touché, et je l'embrasserai chaque jour.
A quand, mon ami?
Je t'embrasse de toute la force de mon amour.
Renée Jeanne
Renée Jeanne Mignard©